L’année 2022 avait jeté une ombre inquiétante sur le marché de l’immobilier logistique en enregistrant au troisième trimestre la plus faible performance depuis 2015, avec seulement 743 000 m² commercialisés. La fin de l’année avait vu les chiffres du secteur plonger, aussi bien en termes de demande placée que d’investissements…
Malheureusement, 2023 ne semble pas marquer la fin de cette période délicate, bien au contraire. En effet, les défis ont persisté sur le marché de l’immobilier logistique, mettant à l’épreuve la résilience du secteur. Lumière sur une nouvelle année de chute libre pour la logistique.

 

Des performances en baisse

immobilier logistique 2023

Les chiffres annuels sont en berne : le marché français de l’immobilier logistique, avec 3,6 millions de mètres carrés commercialisés en 2023, enregistre un recul de 24 % par rapport à 2022, soit 19 % en dessous de la moyenne quinquennale, selon CBRE, mais reste conforme à la moyenne décennale (3 508 800 m²) relativise JLL.

 

Moins de petits entrepôts, plus de plateformes XXL 

Dans ce paysage en évolution, certaines tendances émergent clairement. On voit moins de transactions de petits entrepôts et bien plus de projets de plateformes XXL. Et, en effet…

  • Le segment des entrepôts XXL (plateformes supérieures à 40 000 m²) s’est distingué avec 16 réalisations, représentant, en m², un quart de la demande placée en France sur l’ensemble de l’année.

  • Les transactions pour des entrepôts de taille moyenne (20 000 m² – 40 000 m²) se maintiennent puisqu’elles concentrent 1/4 du volume placé et 15 % des signatures enregistrées, soit 33 transactions.
  • Le créneau des 5 000 m² – 10 000 m² est en complète perte de vitesse, ne totalisant que 98 transactions contre 128 un an plus tôt.
  • Par ailleurs, les entrepôts compris entre 10 000 m² et 20 000 m² se révèlent être les véritables acteurs dynamiques de 2023, concentrant plus de 31 % du volume placé, avec 75 transactions enregistrées.

 

Les logisticiens comme acteurs de l’année

Face à la réduction d’activité des retailers, les prestataires logistiques jouent un rôle central sur la scène de l’immobilier logistique. Leur agilité et leur modèle d’offre flexible s’adaptent parfaitement à l’incertitude actuelle. 

« Face au manque de visibilité des chargeurs à court terme, les logisticiens – dont le modèle repose sur une offre flexible – continuent d’être les principaux soutiens du marché avec une performance annuelle robuste, en ligne avec la moyenne quinquennale » explique Pierre-Louis Dumont, Directeur Exécutif Agence I&L France.

Les géants de la grande distribution participent toujours activement au niveau des commercialisations d’entrepôts en France, suivis des entreprises du secteur industriel. 

 

Une nouvelle dynamique du marché

immobilier logistique 2023

La Dorsale, regroupant les marchés historiques de Paris, Lille, Lyon et Marseille, connaît un déclin significatif de 40 % dans la demande placée. Saturation du marché, changements dans les modèles d’approvisionnement font partie des raisons qui expliquent cette baisse.

 

La Dorsale élargie, à la poursuite de nouveaux espaces

Nous l’avions vu lors de notre précédente analyse : en parallèle, la Dorsale s’élargit. Le 4ème anneau parisien, par exemple, représente 16 % de la demande placée nationale, surpassant les marchés lyonnais et marseillais réunis. 

Des marchés secondaires comme le Centre Val-de-Loire et la Normandie gagnent également en popularité et prennent respectivement les 4ème et 5ème places du marché français, représentant 12 % et 9 % de la demande placée nationale.

En comparaison, les marchés lyonnais et marseillais perdent des parts de marché. Réunis, ils ne représentent même pas 15 % de la demande placée nationale – respectivement 243 000 m² et 274 500 m² placés.

 

L’immobilier logistique, en quête de restructuration

Les entreprises demeurent impactées par la hausse des coûts, le durcissement des conditions de financement et les nouvelles contraintes environnementales, des facteurs qui complexifient le lancement de nouveaux projets de prise à bail ou d’acquisition d’entrepôt.

Alors que les opérations clés en main accusent un recul significatif, les entrepôts neufs restent attrayants pour les utilisateurs, démontrant un intérêt croissant des entreprises pour la sobriété foncière.

Dans cette perspective, l’émergence de projets à étages – déjà bien démocratisés chez nos confrères asiatiques – pourrait bien devenir la norme, stimulée par la raréfaction du foncier et l’objectif zéro artificialisation nette en 2050.

Hôtels logistiques urbains, mutualisation des transports, report modal… De nouvelles solutions devront être trouvées par le secteur s’il veut survivre aux enjeux qu’il rencontre.


En examinant de près ces tendances, il est clair que le secteur de l’immobilier logistique en France est dans une période de transition où l’on doit inventer et recréer de nouvelles organisations pour créer une supply chain durable. 

Les acteurs du marché qui comprendront cela et qui sauront s’adapter à ces changements auront l’avantage de rester compétitifs par rapport aux autres. En fin de compte, la clé du succès résidera dans la capacité à voir à très long terme et à adopter des stratégies d’investissement afin d’anticiper et de participer à la transformation du secteur entier.